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Denise Bombardier, Nos chères amies
Le 31 juillet 2008
On aime ou on n’aime pas. De toute façon, c’est bien simple : il suffit de taper « Denise Bombardier » sur un moteur de recherche pour voir surgir, irrémédiablement accolés au nom de l’écrivaine, les mots « controverse » et « polémique ». Mais elle s’en fiche comme de l’an quarante. Regard droit, sourire franc, manières drues, cette femme-là n’a pas de temps à perdre et ne vous l’envoie pas dire: c’est à prendre ou à laisser. Les petits marquis parisiens et leurs homologues québécois ( si, si, il y en a ! ) sont invités d’avance à aller se faire défriser. Insolence d’ailleurs payante : elle vaut à la bouillonnante Denise la faveur d’un immense public de femmes. Nul doute qu’avec son « Nos chères amies… » ( Editions Albin Michel) , elle va multiplier les dividendes de ce capital de sympathie. Avec une tendresse et une sérénité qu’on ne lui soupçonnait pas, elle s’aventure ici dans une région méconnue du sentiment féminin: les amies. Quelle est la fille qui ignore ce lien tout en complicités, fous rires, jalousies, complots, intermittences du cœur, petits et grands secrets ? Jusqu’à la jalousie, bien sûr, et parfois jusqu’à la rupture … C’est d’ailleurs à la suite d’une dispute avec une amie que la plus célèbre des écrivaines québécoises, par ailleurs parolière de Céline Dion, s’est interrogée sur l’importance de l’amitié dans le quotidien des femmes. Et sur l’absence d’analyse et de réflexion qui, paradoxalement, l’a toujours entourée ! Conséquence de la terreur qui saisit les hommes dès que nous nous mettons à « jaser », pour parler comme à Montréal ? Si telle est l’explication, il faut dire que les messieurs ont raison d’être effrayés : quand nous parlons d’eux, tout y passe, et pas de quartier ! Et que dire des conspirations qui s’ensuivent : elles finissent par avoir la peau des plus roués Don Juan…Finesse d’observation, bon sens à toute épreuve : Denise Bombardier nous livre ici l’expérience de toute une vie. Sans barguigner, sans s’encombrer non plus de subtilités "psy". Son essai est donc à savourer comme ces pâtisseries qu’on s’offre les jours où on envoie tout promener, le régime et le reste, et qu’aux grosses prises de tête métaphysico-solitaires, on préfère le bon et franc plaisir d’une tranche de papotages. Au Québec comme en France ou ailleurs, ces interminables et secrètes conversations de filles ont le don de faire tourner les mâles en bourrique. En lisant ce petit texte sensible, malicieux et tendre, ils ne prendront aucun risque, sinon celui de s’instruire. Tandis que leurs dulcinées, elles, en discuteront à perte de vue avec leur meilleure amie…

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